Léon Delépine, Marceline, Yvonne
Léon est l'ainé de la famille DELEPINE.
Il nait à Montigny en Cambrésis, petit village du Nord, le 12 mars 1921, alors que ses parents Eugène et Marie Antoinette LEFORT, sont mariés depuis un peu moins d'un an. Le papa est brodeur, la maman, femme au foyer.
Léon sera le grand frère d'une belle fratrie : huit enfants au total. 17 années le sépareront de Marc, benjamin de la famille. Il a deux ans lorsque nait en 1923 sa première petite sœur Berthe, suivie de Marcelle en 1924.
Cette responsabilité d'aîné renforcera son autorité naturelle, et lui vaudra le surnom de "commandant".
Il fréquentera la petite école communale jusqu'à l'âge de 9 ans. En 1930 la famille déménage pour
Clary. Nouvelle maison, nouvelle école, nouveaux copains.
Bien que bon élève, il n'ira pas au delà du certificat d'études primaires qu'il obtiendra à 11 ans. Dès le diplôme en poche, il prend la direction du monde du travail. A cette époque, l'école est obligatoire jusqu'à 12 ans, avec une dispense dérogatoire pour les jeunes ayant obtenu le certificat d'études plus tôt, ce qui est le cas de notre oncle.
Il est immédiatement embauché comme employé aux écritures chez le juge de paix de Clary, Me Poulet.
- Le juge de paix est un juge de proximité. Cette juridiction contonale mise en place en 1790 a été supprimée en 1958. La mission du juge de paix consistait à régler les litiges de la vie quotidienne, reconnaissance de paternité, querelles de voisinage, conflits bénins entre locataires et propriétaires-
Après avoir aquis quelques années d'expérience professionnelle, c'est pour les Ets Lecoq (usine textile locale) qu'il travaillera jusqu'à son départ de Clary. [Lorsque j'avais eu l'occasion d'évoquer avec Léon ses souvenirs de jeunesse, alors qu'il était en maison de retraite, il m'avait clairement fait comprendre, en frottant l'index et le pouce, que Me Poulet ne le rémunérait pas à sa juste valeur]
1939, la drôle de guerre. En mai 1940, le lendemain de la communion de Madeleine, la famille le cœur déchiré, décide de prendre la route de l' exode.
Dernière photo avant de fermer la maison pour Dieu sait combien de temps :
Les Ets Lecoq confient à Léon une camionnette, toute la comptabilité ainsi que les documents administratifs de l'usine afin de les mettre en lieu sûr face à l'avancée des allemands. Léon part, avec un certain Jules, pour Brionne.
il rejoindra par la suite la famille qui mettra un mois pour atteindre la Loire inférieure.
Ci-dessous un pli qui est parvenu à mes grands parents sur la route de l'exode à Mouaze, près de St Aubin d'Aubigné.
Léon retrouve sa famille à Tharon plage, petite cité balnéaire qui dépend de la commune de Saint-Michel-Chef-Chef, entre Pornic et Saint Brévin.
- Pourquoi "chef- chef" ? La faute à une évolution d'écriture et de prononciation de « chevecier », qui était, jadis, gardien des biens de l'Église. Chevecier passé à Chevechef vers le 17è siècle-
Dès l'automne 40, l'occupant a procédé à des rafles arbitraires de main-d'oeuvre dans le Nord et le Pas de Calais, il n'y a aucune raison que cette mesure ne s'étende pas à toute la zone occupée à plus ou moins court terme. C'est pourquoi Léon ne reste que très peu de temps à Tharon. Rapidement, il traverse la ligne de démarcation et part se réfugier en zone libre.
En avril 1941, sous le régime de Vichy, est créée la Police Nationale. Policier français, un métier d’avenir en 1941 ?
Alors qu’une moitié du territoire est occupée par l’armée allemande et que la zone dite « libre » est dirigée par le régime de Vichy, de profondes réformes structurelles sont engagées par des proches du maréchal Pétain pour moderniser la police. Auparavant, les agents étaient municipaux. Au sein du ministère de l’intérieur est créée la Direction générale de la police nationale, elle-même divisée en trois entités : la police judiciaire, les renseignements généraux, la sécurité publique. Une organisation qui perdurera des décennies plus tard.
Cette période de création de la police est propice aux interrogations. Quel était le devoir du policier face à un gouvernement légal, à une hierarchie respectée, aux ordres imposés, aujourd'hui considérés comme manifestement illégitimes. Comment célébrer à la fois les policiers résistants, ceux qui ont désobéi, ceux qui ont participé à la libération de Paris, sans remettre en cause les principe de cette instituion, fondés sur la discipline, l'obéissance à la loi. Je n'ai pas de réponse.
Il est facile de porter un jugement avc un regard actuel, après qu'on eut construit le mythe de la "France résistante". Tout comme il est faux de dire que les Français ont lâchement collaboré. La défaite, c’est vrai, a stupéfié les Français et les a laissés sans repères. les Français n’ont été, dans leur grande majorité, « ni des héros ni des salauds». Ils ont pu croire que Pétain, en cessant le combat avec l’Allemagne, incarnait une sorte de moindre mal, en attendant mieux. Je sais simplement que Léon n'a jamais pu être suspecté de collaboration et qu'il y avait des resistants parmi sa proche famille.
Nous pensons que Léon a intégré l'école de Police de Périgeux, parce que nous avons le témoignage de Colette Gras (amie de la famille réfugiée dans le sud) qui se souvient de son passage à Cahors, fin 41 ou début 42, avec 2 autres jeunes gens. Les permissionnaires ne pouvant retourner en zone occupée.
Il est musicien, joue du trombone, comme en témoigne cette photo datée d'octobre 42
En 1943, il obtient un poste de gardien de la paix à Nantes.
Il épouse à Saint-Michel-Chef-Chef, le 7 décembre 1943, Marcelline GRASSET, fille de Marcel GRASSET et Berthe LERAT, sœur utérine d'Edmond GUERINEAU, époux de Berthe DELEPINE. Les jeunes mariés ont tous deux 22 ans.
Ce sont frère et sœur, mariés à frère et sœur : Léon Delépine épouse Marceline Grasset. Berthe Delépine épouse Edmond Guérineau le frère utérin de Marceline (Mr Guérineau père étant décédé à la guerre 14/18, son épouse s'est remariée avec Mr Grasset).
Ces images de bonheur ne font pas oublier une autre réalité : les allemands sont partout, c'est la construction des blockhaus du "mur de l'atlantique". Ici l'objectif est de protéger Saint Nazaire.Les jeunes Michelois sont employés à la construction du blockhaus de St-Michel.
deux clichés supplémentaires : Léon et Marcelline vers 1944.
Les jeunes années du couples sont affectées par un problème de fragilité psychologique de Marcelline qui la conduiront à plusieurs reprises à la clinique Saint Augustin de Nantes .
Son état de santé s'améliore enfin et Marcelline est enceinte de leur premier enfant : Gildas naît le 12 juillet 1956. Hélas cette petite âme ne fera qu'un très bref passage sur cette terre. Il meurt à deux mois, le 10 septembre de la même année.
Une année plus tard, en octobre 1957, naît notre cousin Gilles, que toute la famille appelle Gilou.
A cette même époque les colonies se lèvent pour réclamer leur indépendance. L'Algérie, département français, s'enflamme. Le conflit est considéré comme une opération de maintien de l'ordre. Les fonctionnaires de police de la métropole sont envoyés en mission de l'autre côté de la Méditérannée. Police et gendarmerie paieront un lourd tribu.
Léon servira en Algérie en 56/57. Il est ici photographié à Oran en Janvier 57.
Le 8 février 1960, ses démons ont fini par emporter Marcelline qui meurt à 38ans, en laissant un bambin de 2 ans.
Léon se remarie le 20 juillet 1961 avec Yvonne Daribeau, une jeune veuve mère de deux enfants
Notre oncle fera toute sa carrière à Nantes, il aura grade de commissaire au moment de sa retraite.La famille habitait Saint Sébastien sur Loire, banlieue sud de Nantes.
Tante Yvonne est décédee en 2009.
Léon Delépine décède le 20 septembre 2014 à l'âge de 93 ans.
Gilles est papa de quatre enfants : trois garçons : Richard, Martial, Frédéric et une fille Stéphanie.
Quelques photos de famille pour terminer
Ci dessous : Sylvain, Marceline, Léon et Adrienne à tharon :
Avec Edmond Guérineau et Adolphe Lenglet sur le bac à Mindin :
Repas de famille au Pouliguen, avec Madeleine ma marraine et son mari Claude LAMARRE.
Léon et Marceline moto de gauche , Edmond et Berthe, moto de droite .
Quelques photos plus contemporaines
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Date de dernière mise à jour : Dim 27 oct 2024
Commentaires
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- 1. Eveline Charrier Le Mar 19 mars 2019
Bonjour,
je suis la petite fille de Germaine Costes de Nantes commune Chantenay où Léon a habité étant jeune
je le vois avec oncle Maurice et ma maman Denise sur une photo !
je suis allée une fois voir sa soeur qui gardait des enfants
Bien Cordialement-
- Dominique LENGLETLe Mer 31 juil 2019
Bonjour Eveline et merci de vos encouragements, la soeur de Léon est notre "Tata Berthe" à St Michel Chef Chef, une page lui est également consacrée, page réalisée pour un de ses fils, Jean-François Guerineau, mon cousin Cordialement Domi
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- 2. Caroline Waxin Le Lun 16 fév 2015
Ce Monsieur a donc travaille pour mon Grand Pere qui etait Eugene Lecoq-
- Dominique LENGLETLe Mar 17 fév 2015
Tout à fait exact Caroline. L'usine était très importante sur Clary et plusieurs membres de ma famille y ont travaillé.cordialement
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- 3. philippe samson Le Jeu 25 sept 2014
C'est poignant de voir ces photos et ainsi voir défiler la vie d'un homme.
Gros bisous à tous
Phiippe (mari à sophie delepine)-
- Dominique LENGLETLe Ven 26 sept 2014
Merci Phil de tes encouragements, suis heureuse de faire partager aux plus jeunes les souvenirs que nous avons en commun,...avant qu’Alzheimer nous rattrape les uns après les autres. D'ou l'intérêt de me faire parvenir les photos qui peuvent intéresser la communauté.
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