Famille Michon Elnecave
Michel Michon et Nelly Elnecave
Fille de Michel et Nelly Elnecave. J'ai créé cette page en souvenir de mes parents disparus, victimes de la Shoah ,en collaboration avec ma cousine Lucette Berranger. Ce témoignage comporte de nombreuses photos, n'hésitez pas à cliquer sur ces photos pour les agrandir.
Ma maman, Nelly Ventura Elnecave est née en 1903 à Constantinople (Turquie), elle a 3 sœurs ( Sarah, Régine, Louise) et un frère (Haïm, dit Vitali). sa famille arrive en France en septembre 1919.
mes grands-parents :
Joseph Elnekave (1870/1927) et Rachel Lévy (1877/1955)
Ci-dessous : ma maman et ma grand-mère avant leur départ de Constantinople. Ma mère s'occupait de sa grand-mère aveugle, elle avait abrégé ses études, ce qui explique son orthographe defaillante.
Maman, Nelly Elnecave est la sœur de Louise, (dite Lucie ou Léa) épouse Angel voir page :Famille Salomon Angel
et de Vitali Elnekave : voir page Haïm Elnecave dit Vitali.
Mon papa : Michel Monachem MICHON ELIAZET dit, "Michel Michon", né à Constantinople en 1901.
Mon père qui ne manquait pas de prestance a travaillé un temps comme serveur au restaurant du Fouquet's avant la guerre. Avec le conflit vient le temps de la débrouille, de la chine, achat-revente de tout ce qui porte valeur en période difficiles.
Dès son arrivée en France en 1919, à l'age de 18 ans, il prend un engagement de 5 ans dans la légion étrangère. C'est à Brulon, dans la Sarthe qu'il s'installe à son retour d'armée en 1924. il contractera un 1er mariage et divorcera avant de rencontrer ma mère.
Mon père, un soldat d’origine étrangère, qui a mérité sa nationalité Française
Demande de naturalisation de mon père :
La naturalisation est acceptée, mon père obtient la nationalité Française, hélas elle sera remise en cause.
Comme s’il n’y avait pas de préoccupations plus urgentes, avant que les autorités allemandes n’aient demandé des mesures contre les Juifs, le gouvernement de la France décrète, un mois après la signature de l’armistice, le 22 juillet 1940, la révision des naturalisations obtenues depuis 1927 : de ce fait, 7 000 Juifs perdent la nationalité française.
Menachem Michon épouse Nelly Elnecave le 24 décembre 1936, ci dessous Bulletin de mariage du XIè arrondissement.
Lors de son mariage, ma mère opte pour la nationalité française de son mari ( naturalisé par décret du 31 juillet 1928)
Ma mère, avant son mariage, travaille avec ses soeurs dans la petite entreprise de leur père , aux ateliers du 81 rue St Maur :
Fabrication et réparation de parapluies. Elle y fait les travaux de couture.
Mes parents habitent au 47 rue Saint Maur, dans le XIè arrondissement de Paris, à proximité de mes grands parents, et de ma tante Régine (épouse Victor Valero) qui habite au 81.
Mes parents sont comblés par ma naisance en 1938.
Ma grand-mère Rachel, sera comme une mère pour moi jusqu'à son décès en 1955.
1940
Dès le printemps ma tante Léa et son mari Salomon, ont quitté Lille pour se réfugier à Tharon-plage, en Loire Inférieure, les nouvelles se font rares, nous les espérons à l'abri, loin de Paris où nous sommes plus exposés.
Tante Régine à quiité la région parisienne pour se réfugier en Aveyron avec mes cousines Jeannette et Rachel, mon cousin Maurice, son époux Victor Valéro, pas encore démobilisé ira les rejoindre un peu plus tard. Ma grand-mère Rachel, veuve depuis 1928 les accompagne.
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1941
Les premières arrestations du 20 Août 1941 vont toucher notre entourage proche, les deux beaux-frères d'oncle Victor Valero : David Angel, époux de Louisa Valéro, ainsi que David Ventura époux de Suzanne Valéro.
L'arrestation de notre oncle Vitali (Haïm), lors de la rafle du 21 Août 1941, renforce notre sentiment d'insécurité. Les conditions de vie au camp de Drancy sont difficiles, la nourriture rare, maman fait tout ce qui est en son pouvoir pour aider son frère.
Extrait courrier de Haïm à sa soeur Régine:
"Je mange bien grâce à Nelly Elle m'envoie chaque semaine un colis d'alimentation, elle me lave le linge..."
Vitali restera plus d'un an prisonnier à Drancy, il partira par le convoi 34 le 18 septembre 1942.
1942
la catastrophe s'abat à nouveau sur la famille : à Tharon, tante Léa, son mari Salomon Angel et mes 7 cousins ont été arrêtés. Nous ne les reverrons pas. Tante Lucie partira comme son frère par le convoir 34 du 18 septembre 1942. Volonté de Vitali ou simple hasard, nous ne saurons jamais.
Sur la pression de toute la famille, mes parents se décident à se séparer de moi. C'est ainsi que Geneviève Perrot entre dans ma vie, c'est à elle que je dois ma survie. Genevieve ( 100ans aujourd'hui) était une amie de ma cousine Rachel, toutes les 2 à la JOC (Jeunesse Ouvrière Chrétienne) à Villefranche de Rouergue ;Sa mère Cécile était à Paris et devait venir rejoindre sa fille pour du travail..? Elles ont convaincu mes parents de me confier à elle pour rejoindre ma grand-mère, ma tante et mes cousines.
1943
J'arrive à Villefranche de Rouergue, je suis confiée à tante Régine et oncle Victor. Je suis heureuse, protégée et entourée d'affection, ma grand-mère veille sur moi.
Quelques photos de cette période :
Scolarisée à l'école sud de filles de Villefranche de Rouergue (je suis la 9è au 1er rang en partant de la gauche)
Maman, à qui je manque beaucoup, nous écrit aussi souvent qu'elle le peut, j'ai récupéré ces lettres chez tante Régine qui deviendra ma tutrice après la disparition de mes parents.
1ère lettre 14 septembre 1943.
Maman remercie tante Régine qui lui a envoyé un colis. Elle lui donne l'autorisation de me scolariser à l'école catholique, chez les sœurs. Pleine d'optimisme, elle me dit qu'oncle Vitalo, lorsqu'il sera de retour, m'achètera une bicyclette.
Lettre du 13 novembre 1943
Maman voudrait que je puisse remonter à Paris pour Noel , mais la famille la dissuadera de cette folie. D'ailleurs, tous les enfants "djudios" sont partis se réfugier à la campagne. Maman s'inquiète du coût que représente ma vie dans le sud, alors qu'elle n'a pas le permier sou pour indemniser sa famille. Elle serait heureuse de recevoir quelques noix pour pouvoir les manger avec du pain.
Lettre du 2 décembre 1943
Maman s'inquiète comme toujours de savoir si les tickets de ravitaillement qu'elle envoie avec ses lettre ne disparaissent pas en route, et sont bien réceptionnés par tante Régine. Elle a aussi une terrible nouvelle à l'attention de tante Régine : sa belle mère, Mme Valéro et sa belle soeur Suzanne Valéro épouse Ventura ont été arrêtes avec les deux enfants Joseph et Colette : voir ma page Famille Ventura Valero. Maman qui avait une grande amitié pour Suzanne est très affectée, d'autant qu'elle ne peut plus fuir Paris pour rejoindre sa famille " j'ai sur tous mes papiers "DJUDIOS" en rouge"
Lettre du 24 décembre 1943
Maman s'adresse cette fois à Jannette, ma cousine, la fille de Régine.
Elle regrette bien entendu mon absence pour Noel mais elle est rassurée de me savoir au loin. Elle y parle des nouvelles personnes du quartier qui ont été transférée à Drancy .
La lettre transcrit surtout sa très grande frayeur par rapport à tous les bruits qui circulent, situation dont on ne veut pas, on ne peut pas, parler ouvertement "je vais vous dire qu'il y a ici des bruits terribles... j'ai bien peur pour vous...si vous pouviez aller coucher chez des voisins pour quelques temps...parce qu'ils disent que ce sera partout pareil... il y a ici quelque chose, tu me comprends... mais des fois ce n'est pas vrai...ne vous en faites pas trop, parfois on ne couche pas chez nous"... et malgré tout la vie continue, le cousin Jacques s'est fiancé, il a raison, la vie est si courte (Je pense qu'il s'agit de "Djako Angel)
Lettre du 1er janvier 1944- dernière lettre
Maman remercie tante Régine pour l'envoi d'un coq avec lequel papa et elle se sont régalés. Probablement génée elle demande, qu'on n'envoie plus de viande, des noix suffiront. Maman parle d'envoyer de l'argent pour payer le coq, c'est tout ce qu'elle peut faire, la vie à Paris est très chère et "si elle n'achète pas, ils ne mangent pas".
Maman parle de la machine à coudre de Vitali, objet de valeur, qu'elle à confié à la voisine Madame Le Henaf, dont le mari est agent "tu te rappelleras de son nom, s'il nous arrive quelque chose tu iras la réclamer" ( Lorsque ma tante Régine ira réclamer la machine à coudre, Madame Le Henaf répondra qu'elle ne lui avait jamais été confiée...)
Maman est plus ou moins en conflit avec papa qui lui fait la vie dure: il veut tout vendre pour pouvoir manger, et aussi pour ne rien "leur "laisser (à ceux qui les arrêtent et se partagent les biens des juifs). Maman ne veut pas, tous en pensant que peut-être il a raison...
Mes parents seront arrêtés le jeudi 3 février 1944. L'entrée de mon papa est enregistrée à 23 h 30, celle de ma maman à 2 h00 du matin dans la nuit du 3 au 4 février
Ils quitteront Drancy par le convoi numero 68 du 10 février 1944
Ironie de l'histoire, la lettre confirmant le maintien de la nationalité française de mon père arrivera le jour de son arrestation.
Les services de l'OSE (Oeuvre de secours aux enfants) qui avaient permis de me cacher, ont continué leur action après la guerre, c'est ainsi qu'ils ont trouvé une famille américaine acceptant de me parrainer. Ma tante leur a envoyé, comme recommandé dans le courrier, "une petite photo avantageuse"
Mme Trude MAUSBACHER
6006, Westminster Place
SAINT LOUIS MISSOURI (USA)
Je dois aux membres de ma famille qui ne furent pas déportés d'avoir pu grandir dans la chaleur et l'affection, et dans le souvenir ému et douloureux de tous ceux que nous chérissions et qui ne sont pas revenus.
J'ai pu poursuivre mes études en tant que pupille de la nation.
ci dessous : Colonie de vacances à Stalla plage, photo de classe au collège Parmentier.
Promenade dans les rues de Paris avec mon amie Paulette
Ci-dessus, une sortie scolaire lorsque j'étais au Lycée porte de Clichy. Promenade dans les rues de Paris avec mon amie Micheline
En 1955 voyage en Israel : sur le paquebeauavec le Stomboli en toile de fond. En uniforme ma cousine Juliette Bonfil devenue Esther, épouse de Bernard Kawibor. Les jeunes mariés effectuent leur service militaire.
Quelques autres photos en vrac
Mon cousin Maurice Valéro sur les 4 photos ci-dessous
La U.N.E (la unión nacional española, était une organisation antifranquiste créée en 1942 par le Parti communiste Espagnol près de Montauban pour lutter depuis la France contre la dictature Franquiste et contre l'occupant nazi). (Merci à Miguel Bousquet). Ma cousine Jeannette, qui était également l'amie de ma maman) a passé 5 années à Villefranche elle était proche des jeunes espagnols anti-franquistes.
Mes camarades d'enfance André et Pierrot Barnabé. Mes cousines Rachel et Jeannette
Date de dernière mise à jour : Mer 27 avr 2022
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