Cetait au temps ...

Narcisse Louvet (1879-1950)

Narcisse Louvet. Un homme, des vies

Habituellement, un seul article suffit à raconter une vie, même riche en événements. Mais Narcisse Louvet, par son parcours singulier et les nombreuses archives que j'ai pu rassembler, mérite une approche différente. Compte tenu de l'importance des informations et de la documentation disponible, j'ai choisi de consacrer trois articles à cet homme et à son entourage.

Le premier article, que vous vous préparez à lire, est un préambule qui dresse un portrait général de Narcisse et esquisse les grandes lignes de son existence. Les deux suivants s’attarderont sur les familles de ses épouses successives Angèle Taisne et Mathilde Lenglet.

Ce découpage me permet de vous offrir de multiples photos, une immersion plus complète, tout en préservant une clarté de lecture. Bonne découverte !

Jeunesse à Montigny

Automne montigny

Le 30 octobre 1879, alors que l’automne enveloppe le Cambrésis de ses couleurs chaleureuses, Narcisse Louvet voit le jour dans le paisible village de Montigny, par Clary, comme on le nomme alors.

Deuxième fils de François Louvet, artisan tisserand et cultivateur, et son épouse, Marie-Augustine Denimal, une femme aussi habile au métier à tisser qu’à entretenir son foyer, Narcisse grandit dans une famille modeste, mais laborieuse.

Il partage son enfance avec son frère aîné, François, né presque une décennie plus tôt, et sa sœur Célestine, née en 1874, dans une maison où l’on vit au rythme des champs, à la belle saison, et des métiers à tisser le reste du temps. Tous sont habitués, très jeunes, à participer aux tâches familiales, mais contrairement à la génération précédente, ils iront à l’école. Elle devient obligatoire à partir de 1881.

C’est un solide jeune homme, blond aux yeux bleus, de taille moyenne pour l’époque avec son mètre soixante-sept, armé pour l’existence, grâce à son niveau d’instruction, qui aborde l’âge adulte. Épaulant son père au travail de la terre, il se définit comme cultivateur, contrairement à son frère François qui choisit le tissage.

Lorsqu’il se présente devant le conseil de révision, il est déclaré « bon pour le service » d’autant plus qu’il possède déjà un niveau correct d’éducation militaire, grâce au bataillon scolaire, ou son équivalent. Il fait partie de cette génération élevée dans l’esprit de revanche face à l’humiliation subie face aux Prussiens en 1870.

Narcisse entre au service militaire en novembre 1900. Pendant trois ans, il y forge son caractère et ses compétences, au point de sortir avec le grade de maréchal des logis, soit sergent.

800px bataillon scolaire brochure vers 1885

Mari et père

Si ses années de jeunesse sont marquées par une certaine simplicité, son parcours prend, à l‘âge adulte, une tournure dramatique et complexe. Deux mariages, quatre enfants, des deuils précoces qui seront développés dans les chapitres à venir.

Son premier mariage, en 1904, avec Angèle Taisne, illumine essentiellement sa vie, mais leur union est tragiquement écourtée par le décès prématuré d’Angèle. Le couple vit alors à Bertry, Narcisse déclare sur son acte de mariage être employé de brasserie. Où exactement ? Difficile de répondre. Il existe alors quatre brasseries au village.

Le jeune veuf de 27 ans, avec une fillette, unit alors son destin à celui de Mathilde Lenglet. Avec elle, il fonde une nouvelle famille de trois enfants.

La grande Guerre

siège de Maubeuge

Quand, le dimanche 2 août 1914, tous les clochers de France font entendre un sinistre tocsin, tout le monde s'est arrêté, pétrifié. Les Français ont compris. La guerre est déclarée.

Narcisse est rappelé sous les drapeaux au sein d’un régiment d'infanterie territoriale affecté à la défense de la forteresse de Maubeuge.

Lors du siège de la ville, du 28 août au 8 septembre 1914, le régiment sera, avec d’autres, fait prisonnier. 45000 combattants seront déportés et internés dans des camps de prisonniers en Allemagne. Pour Narcisse, ce sera direction Münster en Westphalie.

Le sort exact réservé à ces captifs par l'ennemi est ignoré en France durant les premiers mois de la guerre. Il est peu à peu connu grâce aux lettres échappées à la censure ou aux témoignages des premiers évadés. Aucun règlement militaire allemand ne fixe vraiment le sort des prisonniers : autant de camps, autant de régimes particuliers. Le traitement des hommes de troupe est sévère, celui des officiers plus adouci. Astreints à de lourds travaux, sous-alimentés et sans hygiène, les hommes épuisés sont victimes d’épidémies en tous genres.

Narcisse passe plus de quatre années dans ces conditions éprouvantes. Il ne sera rapatrié en France qu’en janvier 1919. Là encore, rien n’est simple, dans notre région en partie détruite par le conflit, le retour dans les foyers est chaotique et très mal organisé. Beaucoup de prisonniers finiront par rentrer chez eux par leurs propres moyens à pied, dans des charrettes, ou en train pour les plus chanceux. Mais au moins, il est vivant et physiquement intègre, ce n’est pas le cas de tous.

Prisonniers guerre

De retour dans leurs communes, les anciens prisonniers ont de quoi être déçus par l’accueil qui leur est réservé, car ils ne reçoivent pas les honneurs espérés. L'amertume s'installe. Ils n'ont pas leur place dans les fêtes organisées pour célébrer la victoire : c'est le sacrifice des poilus pour défendre le sol de la patrie qui est valorisé. Les prisonniers sont oubliés, a fortiori lorsque l'on ne connaît pas les conditions de leur capture et qu'ils sont indemnes. Ils sont exclus des distinctions honorifiques consenties aux autres soldats. Il faudra attendre 1922 pour que le gouvernement attribue aux prisonniers décédés en captivité la mention « Mort pour la France ».

Peu à peu, entouré des siens, Narcisse se reconstruit. La vie reprend ses droits, partagée entre le quotidien, la joie de connaître ses petits-enfants, mais aussi les peines et les deuils, jusqu’à son décès à Bertry, en 1950.

Narcisse louvet 164030

Ici se termine l’article consacré exclusivement à Narcisse Louvet. Je vous propose de continuer à faire connaissance avec son entourage. Nous plongerons prochainement dans les deux grandes périodes de sa vie, auprès de ses épouses successives, Angèle Taisne de Montigny puis Mathilde Lenglet de Bertry, avec le témoignage des familles qu’il a contribué à bâtir.

Je remercie d’ores et déjà Jean-Claude Taisne, pour la première union de Montigny et Fabienne Souissi pour la famille bertrésienne. Tous deux m’ont apporté les informations et les photos nécessaires à l’élaboration des articles.

 

Heureuse avis

 

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Date de dernière mise à jour : Dim 09 fév 2025

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Commentaires

  • Fabienne Labrosse
    • 1. Fabienne Labrosse Le Sam 08 fév 2025
    Quel bel hommage à mes ancêtres.
    Rédigé avec ton talent.
    Grand merci Dominique !
    • Dominique LENGLET
      • Dominique LENGLETLe Dim 09 fév 2025
      C'est un plaisir de pouvoir travailler sur des personnages dont les proches peuvent dresser le portrait. Cela aide !
  • Jean Claude Taisne
    • 2. Jean Claude Taisne Le Ven 07 fév 2025
    Comme elle était belle ma grand tante Angèle !! Première femme de Narcisse ..
    • Dominique LENGLET
      • Dominique LENGLETLe Ven 07 fév 2025
      heu, oui elle est magnifique, mais c'est le chapitre 2 mon ami !
  • Christiane Bruneau
    • 3. Christiane Bruneau Le Ven 07 fév 2025
    Bel article qui donne envie de connaitre la suite !
  • DHERBECOURT
    • 4. DHERBECOURT Le Ven 07 fév 2025
    très jolie 1ère partie, très bien écrite, hâte de lire la suite

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