Adrien et Robert Ciriez-Daubigny
Robert Ciriez-Daubigny 1928-2000
Producteur de cinéma. Il eut son heure de gloire dans les années soixante. Son nom m'est apparu par hasard...enfin presque ! Ce serait sans compter le redoutable pouvoir des algorithmes de notre ami Google.
Et, comme on dit maintenant, cela a tout de suite "matché". " CIRIEZ" et "DAUBIGNY" voilà qui me parle ! Cene peut pas être une coïncidence !
J'ai évoqué ces deux familles, lors de mon article Paris 1871, la Commune, Les Ciriez
Un rapide tour dans les biographies publiées sur la toile et j'apprends que Robert est le fils d'Adrien Robert François Louis CIRIEZ-DAUBIGNY et de Juliette DANLOS
Il ne me reste plus qu'à suivre les fils de l'écheveau.
Adrien CIRIEZ, une "success story" à la française.
La génèse :
Adrien (fils de François et Hélène FONTAINE) et "Adrien Robert François Louis CIRIEZ-DAUBIGNY" ne sont en fait qu'une seule et même personne. Comme on peut le constater sur son acte de naissance . C'est le 23 mai 1884, à huit heures du matin qu'il voit le jour au domicile de ses parents Boulevard de Belleville.
Hélène FONTAINE, sa mère née à Paris, est revenue à Bertry dans le Nord, pour se marier avec son petit cousin François CIRIEZ, en 1875. Elle travaille comme ourdisseuse**, François est "employé de fabrication". Je suppose qu'il travaille chez Ernest TILMANT, fabriquant de tissus, puisque celui-ci est l'un des témoins de l'union.
Leur premier enfant, Marthe naît à Bertry la même année.
Vient ensuite une autre fille, Adrienne. Elle voit le jour à St Quentin en 1878. Le couple a déménagé pour des raisons professionnelles.
En effet beaucoup d'ateliers et usines textiles se sont recentrés dans cette ville particulièrement attractive en raison de sa situation géographique. La cité compte une soixantaine de maisons de commerce qui assurent la vente et l'exportation des marchandises dans toute l'Europe. Parmi ces fabricants de tissus un certain André ROUQUAIROL originaire de Vervins. Peut-être est-ce lui que nous retrouverons un peu plus tard. A défaut d'informations concrètes, j'émettrai des hypothèses, à ne pas interpréter comme des certitudes.
La petite Adrienne ne survivra pas au delà de 1882. C'est à Saint-Ouen-sur -Seine, que nous retrouvons la trace des Ciriez, grâce à l'acte de décès.
Adrien naît à Paris deux ans plus tard. François, son père n'est plus "employé de fabrication", il est devenu "employé de commerce". Il est passé au négoce de textile.
Le début du XXe siècle :
Combien de temps restent-ils dans la capitale ?
Un trou de plus de 20 ans sépare mes informations entre la naissance d'Adrien à Paris et le mariage de sa sœur Marthe avec Emile François HERLEMONT.
On situe cette union en 1898 mais, faute de lieu, je n'ai pas trouvé l'acte. Mariage suivi ide la naissance de leur fille à Solesmes dans le Nord en 1899. Retour donc dans le Cambrésis, haut lieu de l'industrie textile.
Le recensement de 1906 confirmera la présence de la famille à Solesmes. Les hommes travaillent pour un certain ROUQUAIROL. Un rapport avec le précédent ? là encore, je ne peux qu'émettre des hypothèses. André François ROUQUAIROL s’était associé en 1890, à Paris, avec les héritiers de Sigmund KASTOR, pour « la continuation des opérations de la maison de commerce, ventes et achats de tissus avec tous pays et notamment l’Angleterre ». Par manque d'informations je n'ai pas pu affiner ma recherche.
J'ai interrogé l'historienne locale de Solesmes Mme Claudine PARDON : " Rouquairol était un tissage situé avenue de la gare (actuellement ave Aristide-Briand) Ce tissage est cité en 1901 dans la rubrique tissage. Du côté droit de l'avenue on trouve Cirier, fabricant de tissus et Herlemont-Cirier, employé. Je n'ai plus de trace de ce tissage après 1906 jusqu'à présent"
1903 : Adrien s'engage dans l'armée pour trois années, alors qu'il aurait pu être dispensé en tant que "ouvrier d'art " Il est incorporé au 1er régiment d'infanterie, à cette époque il est toujours tisseur.
1904 : Nommé caporal en août. Il passe en disponibilité le mois suivant et sera nommé Sergent de réserve le 8 avril 1905. A cette époque sa fiche matricule nous apprend qu'Adrien réside en Grande Bretagne au Consulat de France à Manchester. C'est donc qu'il pratique la langue.
1906 : Adrien, alors affecté au 127è Régiment d'infanterie de Valenciennes, passe à nouveau en disponibilité pour une période de quatre semaines en vue de se préparer à monter en grade en obtenant un "certificat de chef de section". A l'issue de sa période, ayant échoué, Adrien retourne dans le textile. On peut s'interroger sur les raisons qui l'ont poussé un temps à quitter son milieu professionnel , la question restera à jamais sans réponse.
1910 : le 1er avril est constituée la Société "Maison Demètre, Sault, Ciriez, tissus" le siège social est situé rue de Hauteville à Paris. Adrien est l'un des trois actionnaires. L'objet de la société est la fabrication et la vente de tissus en tous pays. La société deviendra florissante. Nous y reviendrons un peu plus tard.
1915 : l'entreprise gagne en croissance: Elle travaillera pour l'armée. Représailles, en 1918 les allemands lors de la retraitre, incendieront l'usine située à Etreux (Aisne)
La Grande Guerre :
Comme tous ses concitoyens, Adrien est rappelé à l'activité lors de la mobilisation générale du 1er Août 1914.
Dès le 14 août sa bonne connaissance de l'anglais est mise à profit : il est affecté à la "liaison interalliée du champ de bataille" comme interprète stagiaire.
Le 14 novembre 1915 il obtient une citation à l'ordre de la mission militaire française attachée à l'armé britannique. En 1916, il sera promu officier interprète. le 18 septembre de cette même année, il sera grièvement blessé en intervention. Croix de guerre et citation : "Se trouvant avec son unité en première ligne, s'est spontanément offert pour aller reconnaître un ouvrage défendu par environ 200 ennemis, a été grièvement blessé par un éclat d'obus lors de cette reconnaissance".
Paru au Tableau d'honneur de l'Illustration.
Adrien est promu chef du Service de Liaisons de la 4e armée, il rédige un rapport sur sa fonction, rapport qui sera adopté par le General De Laguiche et approuvé par le Maréchal Foch.
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Adrien CIRIEZ sera démobilisé le 10 mars 1919 et promu au grade de Capitaine le 19 juin 1920. Il sera fait Chevalier de la Légion d'Honneur.
L'entre-deux-guerres :
Au plan professionnel, Adrien consacrera l'essentiel de son temps à parcourir le monde entre les différents lieux de production de l' entreprise. C'est ainsi qu'on retrouve trace de son arrivée à New York le 19 juillet 1924 en provenant du Havre. Suivra un autre voyage le 4 novembre 1925.
Ensuite nous retrouvons notre grand voyageur à Québec, Canada le 8 novembre 1924, 11 août 1928 puis le 6 septembre 1930.
Il faut dire que la société s'est beaucoup développée : En 1925, Demètre, Sault et Ciriez, filateurs et fabricants en soieries, lainages, voiles, et cotonnades, ont des fabriques à Roubaix (59), St-Souplet (59), Thizy (69) et Dottignies (Belgique) !
Un formulaire daté de 1924, nous apprend qu'Adrien est toujours célibataire, qu'il voyage en première classe et séjourne au Ritz Calton Hôtel de Montréal.
Demètre Sault & Ciriez créera une filiale canadienne au siège social installé au 34, Mayor Street à Montreal.. L'usine de production à Saint John.
1926 : L'annuaire de Rhode Island, nous apprend qu'Adrien Ciriez est le Président de l'Andrews Mill Co. : L' usine Andrews Mill Company est un complexe industriel historique situé au 761 Great Road à North Smithfield, Rhode Island . Construit à partir de 1918, il abritait un fabricant de textiles de laine peignée français, qui faisait partie d'un important projet de développement industriel dans le nord du Rhode Island à l'époque. Le hangar à tisser est un grand bâtiment de deux étages. l'usine a été achetée en 1918 par la Andrews Mill Company de Frankford, Pennsylvanie , la filiale américaine d'un fabricant de textile français. Sa décision de s'y installer était basée en partie sur les efforts d' Aram Pothier , un homme d'affaires et homme politique canadien-français, et sur la présence d'une grande classe ouvrière francophone.
L'usine n'a fonctionné que dans les années 1920 sous cette propriété (source Wikipedia). Aujourd'hui à l'abandon des projets de reconversion sont en cours.
1929 : nouveau challenge : Adrien et ses associés s'engagent dans la création de "SAFTAN" , Société Anonyme de Fabrication de Tapis A points Noués. L'objet est la création en France et à l'étranger de tapis d'orient en soie au moyen d'un métier à tisser spécifique. Il s'agit d'un procédé de fabrication novateur pour laquelle des brevets sont déposés dans la plupart des pays du monde.
Toutes ces activités laissent-elles une petite place pour la vie privée ?
Le jeudi 8 avril 1926, Adrien CIRIEZ épouse à Nice Chana GRÜNER.
Qui est l'heureuse élue ? Il s'agit d'une artiste lyrique âgée de 42 ans, née à Cracovie en Pologne d'Alexandre et Rizka REISEL. Elle réside à l'hôtel de la Méditerranée, sur la promenade des anglais.
C'est tout ce que nous saurons de la mariée. le mariage sera dissous par divorce en date du 22 juillet 1926. Alors, mariage blanc de complaisance migratoire ? Erreur de jeunesse ? A plus de quarante ans j'en doute.
Entre janvier et Mars 1927, nouvelle découverte surprise : le mariage à Bournemouth (Dorset-England), station balnéaire en vogue, d'Adrien avec Juliette DANLOS.
Juliette Blanche Augustine DANLOS, née a Coutances (Calvados), sans profession, est une jeune femme de 21ans.
Le couple officialisera son union en France, à Neuilly, le 29 octobre 1927. La lecture de l'acte de mariage nous permet de comprendre l'épisode anglais : le divorce d'Adrien, intervenu en juillet 26 n'a été transcrit que le 8 février 1927. Le couple a donc décidé d'aller se marier en Angleterre, avant de pouvoir régulariser en France
De cette union naîtra juste une année plus tard, à Neuilly, le 29 octobre 1928, Robert André CIRIEZ.
Pendant la guerre les usines continueront à tourner et participeront à l'effort de guerre. Ils fourniront du tissus pour les uniformes et des couvertures.
L'après-guerre :
En 1949 ; Adrien CIRIEZ, industriel, s’associe avec un ingénieur, Pierre DANLOS, pour créer une SARL ayant pour objet l’exploitation en France de tous procédés pour la production et le tirage de films en noir et en couleurs.
Dans un communiqué de la Société Fiduciaire de janvier 1950 apparaît pour la première fois le nom de CIRIEZ-DAUBIGNY. Est-ce un "nom d'artiste" que s'est créé Robert qui commence a être connu dans le milieu du cinéma ? existe-t-il d'autres raisons plus personnelles pour ce changement de nom (DAUBIGNY est la patronyme de la grand-mère d'Adiren) ? S'agit-il d'un désir d'appartenance à la noblesse d'apparence, comme le laisse entendre l'auteur Pierre-Marie DIOUDONNAT, auteur de l'encyclopédie de la fausse noblesse ?
Toujours est-il que le changement de nom sera acté par décret paru au Journal Officiel le 18 juillet 1956. Adrien deviendra Adrien François Louis CIRIEZ-DAUBIGNY et son fils Robert André CIRIEZ-DAUBIGNY.
Adrien est décédé à l'âge de 98 ans, le 11 décembre 1982 à Ennery dans le Val d'Oise. Son fils Robert est décédé le 9 novembre 2000 il avait 72 ans.
Annexes
Quelques photos des usines Demètre Sault Ciriez
Ci dessus, la toute première, celle d'Etreux qui sera incendiée par les allemands en 1918. Avec les reparations des dommages de guerre elle sera reconstruite à Saint-Souplet.
l'ancienne usine de Bourg de Thizy (69) transformée en hôtel, le nom des trois fondateurs est toujours gravé au fronton.
Après parution de cet article, une contribution que je dois à Bernard Lemaire, très actifs sur les groupes du cambrésis : l'usine de Saint Souplet dans les années 1960.
Quelques films produits par Robert CIRIEZ-DAUBIGNY
Le Caveau de famille de Francois CIRIEZ à Bertry.
François, son épouse Hélène FONTAINE, leur fille Marthe et son époux y sont inhumés. Adrien et ses descendants n'y sont pas inhumés.
Vous pouvez retrouver l'arbre généalogique ICI
** L'ourdisseuse : dispose les fils dans un certain ordre pour former la chaîne avant de les placer sur le métier à tisser. C'est un travail très délicat.
*** L'illustration : Il s'agit d'une série de planches, dont la parution commence le 30 janvier 1915. Elles contiennent chacune 25 à 28 portraits et noms de personnages ayant été "cités à l'ordre de l'armée, nommés ou promus dans l'ordre de la Légion d'honneur ou décorés de la médaille militaire". Si dans un premier temps, les planches paraissaient en supplément quasi régulier du journal, L'Illustration a ensuite choisi de les publier indépendamment, et ce pour des raisons financières : à partir de juillet 1917, le Tableau d'honneur parut seul et mensuellement, par fascicules de 16 planches. A la fin de la guerre, plus précisément en février 1919, L'illustration avait fait publier 658 planches totalisant 16 489 médaillés.
Remerciements à toutes les personnes qui m'ont aidée, et tout particulièrement aux membres du groupe "genealogie-paris"
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Date de dernière mise à jour : Ven 11 oct 2024
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